MÉMOIRE DE LA COALITION DU BUDGET VERT

Possibilités d’assurer une véritable durabilité : préserver notre environnement, renforcer notre économie et réduire le déficit

Sommaire

L’environnement du Canada est d’une importance capitale pour la prospérité des Canadiens. Il nous fournit l’air et l’eau dont nous avons besoin quotidiennement pour notre santé, les ressources naturelles qui alimentent notre économie et des centaines de milliers d’emplois, ainsi que des espaces et des espèces sauvages uniques. Un environnement sain est garant d’une vie saine et prospère pour tous les Canadiens. Pour maintenir cette prospérité, il est essentiel que le gouvernement fédéral préserve sa capacité d’agir dans les domaines des sciences, des politiques et des programmes relatifs à l’environnement. Le déversement de pétrole qui s’est produit dans le golfe du Mexique en 2010 a fait ressortir les coûts économiques et environnementaux à grande échelle pouvant être entraînés lorsque la protection de l’environnement est sacrifiée à des économies financières à court terme.

La Coalition du budget vert (CBV), en place depuis 1999, réunit vingt des plus grandes organisations canadiennes vouées à l’environnement et à la conservation. Elle a pour objectif d’aider le gouvernement fédéral à élaborer et à adopter les mesures budgétaires et fiscales stratégiques qui sont nécessaires pour assurer la durabilité économique et environnementale à long terme.

La Coalition du budget vert a félicité publiquement le gouvernement du Canada pour les progrès réalisés ces dernières années dans les domaines de la conservation, de l’efficience énergétique, des ressources en eau douce et de la réforme des subventions. Pour le budget de 2012, nous formulons des recommandations visant à tirer parti de ces progrès, et qui présentent aussi des possibilités d’économiser plus de 1,3 milliard de dollars annuellement.

Recommandations prioritaires pour le budget de 2012

1)    Réduire davantage les subventions fédérales aux combustibles fossiles, qui s’élèvent à plus de 1,3 milliard de dollars, pour respecter l’engagement pris par le Canada au G-20, pour donner suite aux mesures prévues dans le budget de 2011 et pour progresser sur la voie de la transition vers une économie axée sur l’énergie propre. L’harmonisation des taux de déduction fiscale dont bénéficient les industries pétrolière et gazière (frais d’exploration au Canada et frais d’aménagement au Canada) avec les taux normaux de dépréciation des immobilisations pourrait engendrer, à elle seule, des économies de plus de 600 millions de dollars par année.

2)    Accélérer la transition vers une économie à faible émission de carbone en instaurant un système de tarification du carbone et en investissant dans l’efficacité énergétique par le truchement d’une stratégie nationale pour des maisons écologiques et un programme d’obligations vertes, ainsi que dans des solutions axées sur les énergies renouvelables, en ciblant les collectivités éloignées et du Nord. (Les recettes tirées de la tarification du carbone pourraient couvrir les coûts du programme s’élevant à 1,82 milliard.)

3)    Renouveler l’engagement du gouvernement d’appliquer efficacement le Programme sur les espèces en péril du Canada en prolongeant l’investissement annuel de 25 millions de dollars, initialement consenti dans le budget de 2007, pour permettre l’établissement d’une approche renouvelée, axée sur l’action concertée sur le terrain et en milieu aquatique, qui permettra de réduire les risques posés aux espèces sauvages comme à l’économie du Canada.

4)    Investir dans les ressources en eau douce du Canada pour améliorer les réseaux d’aqueduc et d’égout des Premières nations, assurer un approvisionnement fiable en eau potable par une surveillance efficace de la qualité et de la quantité des ressources en eau douce, et pour veiller à la santé des écosystèmes régionaux, y compris des Grands Lacs et du Saint-Laurent, des Territoires du Nord-Ouest et du lac Winnipeg : 685 millions de dollars par année pendant 5 ans.

Mesure complémentaire capitale

5)    Mettre en œuvre une réforme écologique des prix garantissant que les prix des biens et services offerts sur les marchés reflètent la totalité des coûts et avantages pour l’environnement et la santé humaine.

Les recommandations détaillées de la CBV sur ces éléments et d’autres mesures seront communiquées d’ici septembre 2011.

Possibilités d’assurer une véritable durabilité

Aperçu

Le gouvernement du Canada a réalisé des progrès appréciés ces dernières années en matière de conservation, de ressources en eau douce, d’efficacité énergétique et de réforme des subventions.

Le budget de 2012 est une occasion tout indiquée pour prendre des mesures stratégiques visant à tirer parti de cette réussite et, se faisant, de réduire le déficit fédéral, et générer ainsi des retombées économiques et des avantages environnementaux plus durables pour les Canadiens. Pour ce faire, le budget de 2012 doit d’abord garantir le maintien de la capacité d’agir du gouvernement fédéral dans les domaines des sciences, des politiques et des programmes relatifs à l’environnement, et donc de sa capacité à protéger l’environnement, la nature et la santé de la population canadienne contre la pollution. Le déversement de pétrole qui s’est produit dans le golfe du Mexique en 2010 a fait ressortir les coûts économiques et environnementaux à grande échelle pouvant être entraînés lorsque la protection de l’environnement est sacrifiée à des économies financières à court terme.

Les recommandations prioritaires de la Coalition du budget vert pour le budget de 2012 – qui présentent aussi des possibilités d’économies annuelles de plus de 1,3 milliard de dollars – sont :

La réforme des subventions aux combustibles fossiles : des options pour augmenter les recettes et progresser sur la voie d’une économie axée sur l’énergie propre

Accélérer la transition vers une économie à faible émission de carbone en misant sur la tarification du carbone, l’efficacité énergétique et l’énergie renouvelable

Les espèces en péril : privilégier l’action

Investir dans les ressources en eau pour des collectivités, des économies et des environnements sains

La Coalition du budget vert recommande aussi des mesures relatives aux importantes questions suivantes :

·         Éliminer les subventions à l’énergie nucléaire

·         Les transports : investir dans les transports en commun

·         Le financement mondial relatif aux changements climatiques : assumer la juste part du Canada dans les pays en développement

·          Élargir la portée des incitatifs fiscaux du Programme des dons écologiques pour qu’ils s’appliquent aux terres en inventaire

·         Améliorer les indicateurs du capital naturel

Recommandations prioritaires détaillées

1) La réforme des subventions aux combustibles fossiles : des options pour augmenter les recettes et progresser sur la voie d’une économie axée sur l’énergie propre

Le recensement et l’élimination des subventions à la production et à la consommation de combustibles fossiles – charbon, pétrole et gaz naturel – forment un volet à la fois important et essentiel à une transition vers une économie axée sur l’énergie propre et vers la prise de mesures pour relever le défi mondial posé par les changements climatiques. L’utilisation des combustibles fossiles est responsable d’environ 80 % des émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine à l’échelle mondiale, et les subventions au charbon, au pétrole et au gaz naturel favorisent l’augmentation de la consommation et de la production d’énergie sale, tout en ayant un effet dissuasif sur les investissements dans des sources d’énergie moins polluantes. De plus, en période de restriction budgétaire, les subventions aux combustibles fossiles imposent un fardeau supplémentaire sur les finances publiques et s’avèrent une utilisation inefficace de l’argent des contribuables. Compte tenu de ces répercussions négatives, le Canada et ses homologues du G-20 ont convenu en 2009 d’« éliminer graduellement sur le moyen terme les subventions inefficaces aux carburants fossiles, qui encouragent le gaspillage », un engagement qui a été réitéré aux réunions suivantes du G-20.

Le Canada verse annuellement plus de 1,38 milliard de dollars sous forme de subventions[i] aux industries des combustibles fossiles, qui regroupent les secteurs du pétrole, du gaz naturel et du charbon. La Coalition du budget vert a félicité le gouvernement pour les mesures annoncées dans le budget de 2007 et le budget de 2011 au chapitre de la diminution des subventions accordées aux sables bitumineux[ii], des mesures qui, selon les estimations, feront augmenter les recettes fédérales d’environ 15 millions de dollars en 2011‑2012, et de 30 millions de dollars en 2012‑2013[iii].

La CBV invite le gouvernement à profiter du dépôt du budget de 2012 pour réaliser des économies additionnelles au moyen de la réforme des subventions aux combustibles fossiles, tout en concrétisant l’intention énoncée du Canada de devenir une « superpuissance de l’énergie propre », en accordant une attention spéciale aux avantages fiscaux suivants dont bénéficient les secteurs du pétrole et du gaz naturel, chacun de ces avantages étant considéré par Finances Canada comme des subventions pouvant faire l’objet d’une réforme[iv] :

·         Frais d’exploration au Canada : des économies potentielles de plus de 200 millions de dollars par année en alignant ce taux de déduction de 100 % sur les taux normaux de dépréciation des immobilisations.

·         Frais d’aménagement au Canada : des économies potentielles de plus de 400 millions de dollars par année en alignant ce taux de déduction de 100 % sur les taux normaux de dépréciation des immobilisations.

2) Accélérer la transition vers une économie à faible émission de carbone en misant sur la tarification du carbone, l’efficacité énergétique et l’énergie renouvelable

Pour accélérer la transition du Canada vers une économie à faible émission de carbone, le gouvernement fédéral doit mettre en place un système de tarification du carbone et faire de nouveaux investissements dans l’énergie renouvelable et l’efficacité énergétique – deux solutions qui seront déterminantes pour que le Canada puisse remplir ses engagements relatifs aux changements climatiques. Dans le budget de 2012, le gouvernement devrait prendre des mesures immédiates pour :

·         Mettre en place un système de tarification du carbone bien conçu, transparent et rigoureux sur le plan environnemental. L’établissement d’un prix du carbone prévisible est considéré comme l’un des moyens les plus efficients et efficaces de s’attaquer aux émissions, tout en donnant aux entreprises un cadre contextuel de marché stable leur permettant de prendre des décisions d’investissement. Tandis que les industries canadiennes continuent de manifester leur appui à un système de tarification du carbone efficace et prévisible[v], plusieurs provinces canadiennes et des pays semblables au Canada comme l’Australie vont de l’avant en s’inspirant de l’Union européenne, et adoptent des politiques de tarification du carbone[vi]. Un système de plafonnement et d’échanges bien conçu ou une taxe sur le carbone peuvent être des stimulants puissants pour encourager les entreprises et les ménages à polluer moins et à investir dans des choix plus propres, en rendant du coup les choix énergétiques propres plus attrayants et la pollution, plus coûteuse. La tarification du carbone peut aussi générer des recettes gouvernementales qui peuvent à leur tour être utilisées pour réduire l’impôt des particuliers, ou encore pour faire des investissements ciblés visant à accélérer l’abandon des combustibles fossiles et la transition vers une économie axée sur l’énergie propre[vii].

·         Tirer parti des programmes d’efficacité énergétique qui réussissent bien au Canada en lançant une stratégie nationale de rénovation domiciliaire écologique. Pour suivre l’exemple des initiatives ambitieuses en place aux États‑Unis et au Royaume‑Uni, le Canada a besoin d’une stratégie exhaustive pour que la totalité de son parc immobilier existant soit rénové d’ici 2030. Le Canada peut commencer en visant 15 % du parc immobilier d’ici 2015, et en effectuant des investissements stratégiques dans l’efficience résidentielle, en particulier pour les ménages à faible revenu, et en prenant appui sur le financement d’un an de 400 millions de dollars prévu dans le budget de 2011 pour le Programme écoÉnergie Rénovation – Maisons. Coût : 1,25 milliard de dollars sur 5 ans.

·         Inciter le secteur privé à investir dans des projets à faible émission de carbone. La création de nouveaux instruments financiers comme des obligations vertes permettrait d’améliorer l’accès aux capitaux pour les projets à faible émission de carbone et jouerait un rôle de soutien clé dans le cadre d’une stratégie en matière d’énergie propre plus globale. Coût : 500 millions de dollars sur 5 ans.

·         Cibler les débouchés durables à long terme dans les collectivités éloignées du Nord. Nous avons été encouragés d’entendre, dans le discours du Trône de cette année, que le gouvernement s’engageait à promouvoir « la mise en place de technologies d’énergie propre dans les collectivités autochtones et du Nord ». Les investissements fédéraux dans les nouvelles technologies d’énergie propre qui ont fait leur preuve peuvent en effet améliorer la sécurité énergétique et réduire les coûts énergétiques à long terme dans les collectivités éloignées du Canada, tout en contribuant à assurer la souveraineté de l’Arctique à long terme. Coût : 70 millions de dollars sur 5 ans.

3) Les espèces en péril : privilégier l’action

Le Programme sur les espèces en péril du Canada réunit un certain nombre d’instruments scientifiques, légaux, de partenariat et d’intendance pour éviter que des espèces sauvages disparaissent à tout jamais et contribuer au rétablissement des espèces qui sont en péril. Environnement Canada, Parcs Canada et le ministère des Pêches et des Océans partagent la responsabilité de la mise en œuvre du Programme. Environ le quart des budgets actuels des ministères affectés au Programme sera épuisé en mars 2012. En prolongeant de cinq années encore cette aide financière à la mise en œuvre de 25 millions de dollars par année, il sera possible d’adopter une approche renouvelée relativement au Programme – une approche axée sur l’action concertée sur le terrain et en milieu aquatique. Cette mesure permettrait de réduire les risques posés aux espèces sauvages comme à l’économie du Canada.

Le Programme sur les espèces en péril du Canada a rencontré quelques défis importants au cours des premières années d’application de la Loi sur les espèces en péril (LEP), soit depuis 2003. Après quelques années difficiles, les ministères sont devenus dernièrement beaucoup plus efficients et efficaces au niveau des aspects du Programme liés à la planification du rétablissement. Toutefois, le travail le plus important reste à faire : dépasser le stade des stratégies de rétablissement pour passer à celui de la mise en œuvre des plans d’action. Les ministères auront besoin du renouvellement de leurs ressources financières afin de développer davantage les compétences essentielles et les partenariats nécessaires pour la mise en œuvre des mesures de rétablissement des espèces en péril. Il faudra notamment établir une collaboration efficace axée sur les résultats avec les intervenants, y compris les propriétaires fonciers privés, les autres ordres de gouvernement, les organisations autochtones, le secteur privé et les organisations non gouvernementales vouées à la conservation.

Ces fonds contribueront à protéger les relations commerciales internationales du Canada en assurant le respect des normes internationales minimales et le respect des engagements du Canada pris en vertu de la Convention sur la diversité biologique. De plus, ce financement servira à documenter le développement constant, assuré par l’État, du plan national de conservation visant la protection et le rétablissement des espèces en péril à un stade plus précoce et, par conséquent, à un coût beaucoup moins élevé que si les mesures étaient reportées[viii].

Investissement requis : 25 millions de dollars par année pendant cinq ans (2012-2017).

4) Investir dans les ressources en eau pour des collectivités, des économies et des environnements sains

L’eau douce est la plus grande richesse du Canada. Pourtant, le Canada se classe loin derrière les grandes nations au chapitre de la protection des écosystèmes et des ressources en eau douce. L’état des systèmes d’alimentation en eau dans les réserves des Premières nations est honteux, la pollution dans les Grands Lacs et dans le lac Winnipeg menace l’écosystème aquatique, la santé humaine et le développement économique, sans compter que les changements climatiques entraînent une hausse de la fréquence et de la gravité des inondations et des sécheresses. Des investissements stratégiques sont nécessaires pour améliorer la qualité et la fiabilité des ressources en eau douce, ressources qui circulent dans les collectivités, l’économie et l’environnement du Canada.

Voici les secteurs d’investissement prioritaires à cet égard :

·         Des collectivités saines – Réseaux d’aqueduc et d’égout : Pour aider à assumer le coût estimatif de 20 milliards de dollars pour la mise à niveau des réseaux d’aqueduc et d’égout[ix], le Canada devrait travailler à la mise en place en 2014 d’une suite au Fonds Chantiers Canada, une mesure qui a été marquée du sceau de la réussite. Il faut toutefois porter une attention immédiate aux réseaux d’alimentation en eau des Premières nations, des Inuits et des Métis. Selon une évaluation effectuée récemment à la demande d’Affaires autochtones et Développement du Nord Canada (AADNC), 39 % des systèmes d’alimentation en eau potable des Premières nations posent un risque élevé d’insalubrité; l’étude a permis de conclure que le ministère devrait dépenser 6 milliards de dollars pour la mise à niveau des infrastructures et la formation au cours des dix prochaines années. Un investissement initial de 600 millions de dollars par année pendant cinq ans est nécessaire pour les mises à niveau, la formation, l’exploitation et l’entretien des systèmes, et pour la recherche sur des systèmes innovateurs pour les collectivités de petite taille, du Nord et éloignées.

·         Des économies saines – Assurer la fiabilité des réseaux d’aqueduc : Des réseaux d’alimentation en eau sécuritaires et fiables seront essentiels à l’avenir de l’économie canadienne. Tous les secteurs dépendent d’informations opportunes et fiables sur l’eau, tant sur sa qualité que sa quantité. Or, selon un récent rapport du commissaire à l’environnement et au développement durable, la qualité et de la quantité des ressources en eau douce n’étaient pas adéquatement surveillées. Des fonds sont nécessaires pour améliorer la collecte et la gestion des données sur l’eau et pour étayer les prévisions à long terme sur la disponibilité et la salubrité de l’eau. Investir 30 millions de dollars par année pendant cinq ans pour moderniser l’infrastructure de surveillance des ressources en eau et améliorer l’expertise canadienne dans ce domaine.

·         Des environnements sains – Écosystèmes régionaux : Il faut, pour assurer la santé des divers environnements aquatiques au Canada, une approche stratégique qui cible les dépenses dans les secteurs prioritaires pour la protection et la restauration. Parmi les priorités régionales, il faudra :

a.    investir 45 millions de dollars par année pendant cinq ans pour les Grands Lacs et le Saint-Laurent (pour l’Accord relatif à la qualité de l’eau dans les Grands Lacs, les secteurs préoccupants et les ZIP, la surveillance environnementale, les espèces envahissantes et une stratégie sur les répercussions des changements climatiques) en continuant d’investir aux termes de l’Accord Canada‑Ontario relatif à la qualité de l’eau dans les Grands Lacs et de l’Accord Canada-Québec (Plan Saint-Laurent);

b.    investir 5 millions de dollars par année pendant cinq ans pour rétablir la santé du lac Winnipeg;

c.    investir 5 millions de dollars par année pendant cinq ans pour soutenir la mise en oeuvre de la stratégie de gérance des eaux des Territoires du Nord-Ouest, élaborée conjointement par le gouvernement des T.N.-O. et AADNC (qui se nommait alors le MAINC).

Réforme des subventions et réformes des prix : une nécessité pour une économie canadienne durable

Une économie canadienne véritablement durable améliorerait de façon continue et intégrée la vie des Canadiens et la santé de notre planète. Une économie durable reconnaîtrait que la conservation et la protection des systèmes naturels sont des éléments essentiels au maintien de notre prospérité et que la santé de notre économie est intrinsèquement liée à la santé de notre environnement.

L’un des éléments essentiels pour assurer une transition positive et efficace vers une économie durable est que les politiques fiscales des gouvernements soutiennent la réalisation des objectifs canadiens en matière de durabilité, plutôt que de nuire à leur réalisation. Deux stratégies fiscales sont particulièrement importantes à ce sujet :

1)    « Équilibrer les règles du jeu » à l’égard de l’exploration et du développement des ressources naturelles par l’écologisation des subventions

En tout premier lieu, les gouvernements doivent « équilibrer les règles du jeu » à l’égard de l’exploration et du développement des ressources naturelles de manière à ce que le traitement fiscal des diverses ressources naturelles soit équitable, ou bien que les politiques fiscales favorisent les ressources dont le cycle de vie et les impacts sur la santé sont les plus positifs. Cela devrait inclure les options de conservation et de recyclage.

La première étape pour mettre en œuvre une telle réforme écologique des subventions, ou écologisation des subventions, consiste à supprimer les traitements préférentiels (« subventions ») actuellement appliqués aux sources d’énergie qui sont non renouvelables ou dont le développement ou l’utilisation entraîne des dommages importants pour l’environnement. Comme on l’a mentionné, le gouvernement fédéral a réalisé d’importants progrès dans ce domaine avec le dépôt des budgets de 2007 et de 2011, et il pourrait réaliser des économies de plus de 600 millions de dollars par année en prévoyant, dans le budget de 2012, d’aligner les taux de déduction fiscale dont bénéficient les industries pétrolière et gazière, en vertu de mesures telles que les frais d’exploration au Canada et les frais d’aménagement au Canada, sur les taux normaux de dépréciation des immobilisations.

2)    S’assurer que les prix du marché « disent la vérité environnementale » par une écologisation des prix

Actuellement, les prix du marché « ne disent pas la vérité environnementale ». Vraiment, comme l’a fait remarquer Sir Nicholas Stern : Le changement climatique est le plus grand échec du marché que l’on ait jamais vu[x] ».

L’économie du Canada ne maximisera les avantages pour les Canadiens et ne sera vraiment durable que lorsque les prix des biens et services offerts sur les marchés diront la vérité environnementale en reflétant la valeur réelle des ressources nécessaires, aujourd’hui et demain, ainsi que les coûts et avantages financiers, environnementaux et sociaux, calculés sur l’ensemble du cycle de vie, liés à leur production et à leur consommation. Cette approche, souvent appelée l’écologisation de la fiscalité (EF), pourrait être mise en oeuvre grâce à divers instruments fondés sur les mécanismes du marché, tels que les taxes, les redevances, les abattements, les crédits, les permis négociables et la suppression des subventions.

La Coalition du budget vert a salué le gouvernement du Canada pour avoir prévu dans ses budgets précédents d’importantes mesures visant la mise en œuvre d’une écologisation de la fiscalité, et dans son prochain document, elle mettra en lumière de nombreuses occasions de tirer parti de ces mesures. L’une des occasions par excellence permettant à la fois de réaliser des économies et d’entraîner des avantages pour l’environnement est à portée de main : éliminer les subventions aux combustibles fossiles, à l’énergie nucléaire, ainsi qu’à l’exploration, à l’extraction et au traitement des minéraux primaires. Tandis que l’instauration d’un système de tarification du carbone constitue une occasion de choix pour contribuer à ce que les prix du marché « disent la vérité environnementale ».


[i]       Sawyer, Dave et Seton Stiebert, 2010, Fossil Fuels: At What Cost? Government support for upstream oil activities in three Canadian provinces: Alberta, Saskatchewan and Newfoundland and Labrador. The Global Subsidies Initiative (GSI) de l’Institut international du développement durable, Genève, novembre 2010 (en anglais).

[ii]      Ces mesures comprennent plus particulièrement les engagements en vue d’éliminer progressivement la déduction pour amortissement accéléré au titre des immobilisations corporelles, et la proposition de réduire les taux de déduction pour les dépenses en immobilisations incorporelles dans les projets de sables bitumineux pour les harmoniser avec ceux du secteur pétrolier et gazier traditionnel.

[iv]     Note de Michael Horgan au ministre des Finances, 18 mars 2010, objet : Engagement du G-20 – Subventions aux combustibles fossiles, http://pubs.pembina.org/reports/department-of-finance-subsidies-memo.pdf (en anglais).

[v]      Conseil canadien des chefs d’entreprise, Kananaskis 2011 : Dresser un programme pour assurer notre avenir énergétique, juillet 2011, http://www.ceocouncil.ca/publications/pdf/test_c586694ea53efeb28b8ac71b2fefdd77/
Kananaskis_2011_Dresser_un_Programme_pour_Assurer_Notre_Avenir_Energetique_Juillet_2011.pdf
.

[vi]     Au Canada, le Québec et la Colombie‑Britannique ont mis en place une taxe sur le carbone. La Western Climate Initiative (l’initiative régionale de l’Ouest concernant le climat), qui réunit 11 États américains et provinces canadiennes, aura un système de plafonnement et d’échanges fonctionnel d’ici janvier 2013.

[vii]    Pour connaître les recommandations de la CBV concernant l’utilisation des recettes tirées du prix du carbone, veuillez consulter la section sur le recyclage ciblé des revenus dans les Recommandations relatives au budget 2011 de la CBV (p. 45 à 48), à l’adresse : http://s.cela.ca/files/GBC-2011-Fr.pdf . Pour obtenir plus de détails sur ce que préconise la CBV au sujet de la tarification du carbone, veuillez consulter les recommandations détaillées de la CBV sur la tarification du carbone dans les recommandations relatives au budget 2009 (Recommendations for Budget 2009, http://www.greenbudget.ca/prop.html, en anglais) et Recommandations relatives au budget 2008 (http://www.greenbudget.ca/propos.html).

[viii]   Drechsler, M., Eppink, F.V. et Wätzold, F. (2011), « Does proactive biodiversity conservation save costs? » Biodiversity & Conservation 20 : p. 1045 à 1055.

[ix]     Une étude effectuée par la Fédération canadienne des municipalités (FCM) et l’Université McGill évalue à environ 19,9 milliards de dollars le déficit de l’infrastructure municipale pour conformer aux nouvelles normes les systèmes d’approvisionnement en eau et de traitement des eaux pluviales et usées. (FCM, novembre 2007, Attention : danger – L’effondrement imminent de l’infrastructure municipale du Canada, ISBN 971-1-897150-21-4, http://www.fcm.ca/Francais/View.asp?mp=601&x=622, p. 16. Le déficit au titre des systèmes d’approvisionnement en eau a quant à lui été évalué à 11,1 milliards sur un déficit municipal pour l’infrastructure total de 123 milliards de dollars.) Par ailleurs, le Conseil canadien des ministres de l’Environnement (CCME) estime qu’il en coûtera de 10 à 13 milliards de dollars pour mettre en œuvre une stratégie pancanadienne permettant de se conformer aux nouvelles normes applicables aux effluents d’eaux usées (CCME, 1er février 2009, Stratégie pancanadienne pour la gestion des effluents d’eaux usées municipales, http://www.ccme.ca/assets/pdf/cda_wide_strategy_mwwe_final_f.pdf, p. iii).

[x]      Le 30 octobre 2006, avis au média, Publication of the Stern Review on the Economics of Climate change, http://www.hm-treasury.gov.uk/newsroom_and_speeches/press/2006/press_stern_06.cfm (en anglais).